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L’administrateur de l’Organisation internationale de la francophonie dresse pour « L’Orient-Le Jour » le bilan des Jeux qui seront clôturés ce soir

Par L’Orient-Le Jour - lorientlejour.com | - mis à jour :

Article de Gaby NASR, paru dans l’Orient-Le Jour le 6 octobre 2009.

Clément Duhaime : « Là où la francophonie gagne, c’est justement par le respect des autres langues ».

L’administrateur de l’Organisation internationale de la Francophonie dresse pour le quotidien libanais « L’Orient-Le Jour » le bilan des VIes Jeux de la Francophonie qui seront clôturés ce soir. Pour cet homme, qui vient d’être reconduit dans ses fonctions en tant que numéro 2 de l’OIF, l’événement a été un double succès pour le Liban et la francophonie.

Quand on évoque la francophonie, on pense d’emblée à la culture puis aux multiples activités artistiques que ce terme a fini par englober, le tout dans un espace géographique bien déterminé. Une définition bien réductrice en regard du considérable travail de gestion et d’organisation accompli en amont. Ce travail relève, depuis janvier 2006, de Clément Duhaime et de son équipe qui ne cessent de se démener pour donner à l’OIF la stature d’une véritable organisation internationale.

Pour ce Québécois, qui a occupé plusieurs postes de responsabilité au sein de l’OIF avant d’en devenir l’administrateur, c’est-à-dire l’adjoint direct du secrétaire général Abdou Diouf, l’Organisation internationale de la Francophonie repose sur quatre piliers : démocratie et droits de l’homme et à la paix ; diversité linguistique et culturelle ; éducation, formation et enseignement supérieur ; développement durable.

Clément Duhaime explique que cette stratégie de l’OIF « est dans la ligne de la réforme souhaitée par Abdou Diouf depuis 2005, visant à simplifier l’organisation pour la rendre plus efficace ». Mais quel besoin au départ de réformer l’OIF ? « On a souvent reproché à la francophonie d’être repliée sur elle-même, de ne concerner qu’une certaine catégorie de gens, on disait même qu’elle était devenue ringarde. Il fallait donc absolument se débarrasser de ce genre de cliché. Aujourd’hui, par exemple, lorsqu’on parle de défendre la diversité linguistique, c’est justement pour réfuter l’accusation de repli sur soi des pays francophones. La force de la francophonie, c’est d’avoir créé des alliances stratégiques avec les autres langues. Elle a arrêté de se positionner dans un combat contre l’anglais, mais elle ne renonce pas pour autant à s’opposer à une langue hégémonique qui peut conduire à un système de pensée unique. »

Mais n’est-ce pas un combat perdu d’avance face à la poussée de l’anglais, une langue elle-même stimulée par les nouvelles technologies ? « Notre principal défi est que le français reste une langue parlée, enseignée et utilisée. Pas de faire opposition à l’anglais. Telles sont nos valeurs, et là où on gagne, c’est justement par le respect des autres langues », affirme Clément Duhaime.

À ce sujet, l’administrateur de l’OIF met en doute l’idée selon laquelle on assisterait à un recul général de la langue française. « Je suis désolé, mais nous avons des chiffres. Le français est peut-être en recul dans certains pays, mais il est en progrès dans d’autres. Ainsi, en Chine, au cours des derniers Jeux olympiques, la présence du français a été remarquable. Les Chinois ont lancé une chaîne mondiale en français, ils enseignent aussi le français. Le Nigeria, l’Afrique du Sud ont réintroduit le français dans l’enseignement, parce qu’ils se sont rendu compte qu’ils ne peuvent pas faire l’unité du sous-continent africain sans le français, une des deux grandes langues de la région. Tout cela sans oublier nombre de pays qui ont adhéré à la francophonie, comme la Bulgarie, la Grèce, le Ghana, la Macédoine... ».

Pour Clément Duhaime, il est incontestable que le français reste la langue des grandes institutions internationales, même sur le Web où elle a progressé jusqu’à devenir l’une des cinq premières langues. « Le tout n’est pas de dire que le français est la langue de Voltaire, Molière et Montesquieu, mais que c’est une langue qui doit être créatrice et se renouveler sans cesse », souligne-t-il.

Quel bilan tire-t-il des Jeux de la francophonie de Beyrouth ? L’administrateur de l’OIF est sans appel : ces Jeux étaient jusque-là probablement les meilleurs. « Certes, il y a eu quelques défaillances et nous procédons à leur analyse. Mais, au départ, quel était le défi à relever à Beyrouth ? C’était de tenir ces Jeux dans les dates et les temps prévus. Pour nous aujourd’hui, c’est très important parce que cela nous permet de regarder vers l’avenir de ces Jeux. Pour le Liban, c’était également une occasion extraordinaire de recevoir 3 .000 jeunes sportifs et culturels de 40 ou 50 pays, parce que ça permettait de montrer que le Liban est un pays tourné vers l’avenir. »

Clément Duhaime a également insisté sur la visibilité de cette manifestation qui devait en assurer le rayonnement. « On a vraiment négocié cette fois avec des médias partenaires : radios, télés, presse. C’était vraiment impressionnant. Certes, il y a encore du chemin à faire, mais j’ai au moins la satisfaction et la fierté de dire qu’on a vu les Jeux dans le monde entier, surtout dans des médias qui s’expriment dans d’autres langues que le français, comme CNN ou al-Jazira ».

Sur le plan organisationnel, l’administrateur de l’OIF a rendu un hommage appuyé au directeur du Comité national de la francophonie, Alain Badaro, et à son équipe, qui ont assuré la logistique, l’infrastructure et l’organisation des Jeux, sans oublier la mobilisation des 500 volontaires pour l’événement. Un bilan largement positif, donc, pour Clément Duhaime qui a estimé que par cette réussite, « le Liban a fait grandir les Jeux de la francophonie ».